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Tempo : suspendus en plein vol
par Manon Ona
Le clou dans la planche
Publié le 02 décembre 2012
"Le long du débarcadère Ou bien dans les couloirs du ventre de leur mère" Jacques Prévert, Le contrôleur.
Ne point s’enfermer dans un profil de création, telle semble être la devise de Bruno Abadie. Le Clou aura rencontré La Compagnie du petit matin il y a une brouettée d’années sur du théâtre d’auteur dédié au jeune public (Alouette, Un cadeau pour Lola) et aux plus grands (Le médecin malgré lui), puis l’aura vu glisser vers une forme oscillant entre théâtre et chant (Exils) : La Compagnie ne semble pas vouloir se fixer et continue à explorer, à repousser les frontières, et c’est finalement en chorégraphe que revient son metteur en scène, quitte à renouveler entièrement ses interprètes – ici, il s’agira évidemment de danseurs tant que de comédiens, sept en tout, sur une musique de Bruno Coffineau. Tempo est présenté comme le pendant plus adulte de Time, spectacle siamois (même concept, même équipe artistique) mis à la portée des enfants de six ans et plus.
Retard à l’embarquement
Suggestif mais volontairement imprécis, le décor dirige le spectateur vers l’imaginaire du voyage : peut-être est-ce là un hall de gare, ou plus certainement la salle d’embarquement d’un aéroport. Sur le fond, les toilettes publiques pour se refaire une beauté avant le décollage ; au milieu, un banc comme on les aime de plus en plus en France et ailleurs – vous savez, ceux dont les barres en métal empêchent le voyageur (ou autre, selon les lieux) de se coucher.
A ces éléments de décor s’ajouteront, tout aussi référentiels mais brassant large en terme d’ancrage visuel, l’agent d’entretien flanqué de son chariot magique, et la flopée de valises des six « voyageurs ». Ce pourrait aussi bien être là un espace métaphorique mais seule compte cette identification rapide, par le spectateur, d’un lieu-moteur à même de générer des bribes d’histoire.
Rien qui ne tienne de la fable, seulement un bon vieux concept pour asseoir les propositions chorégraphiques, et qui ici fonctionne fort bien : il y a ce lieu d’attente, promesse d’un départ qui ne devrait tarder… mais qui sera régulièrement remis à plus tard par des annonces au micro.
Si la langue est alors étrangère, le propos reste clair : vous ne partirez pas. Pas encore, tout à l’heure, demain, jamais peut-être. L’ensemble de l’écriture scénique s’alimente à cette double mécanique de l’attente et du huis-clos. Nulle échappatoire, il va bien falloir frotter les individualités, ménager telle marqueuse de territoire, tel solitaire en mal de silences, tel couple envahissant, les impatiences et exigences de chacun, et la promiscuité de tous ! Difficile de raconter ce qui en résulte, sinon un joyeux et nerveux tumulte, des tableaux chorégraphiques joliment construits en tricot – avec ce plaisir du petit bout de laine, minuscule rien de signification à tirer et tisser jusqu’au bout de pelote. La distribution spatiale et rythmique entre le groupe et le soliste y est très finement sentie.
Parfois, ce n’est pas vers la danse mais vers les percussions corporelles que ce dévidage de bobine tire les interprètes. Une création métissée, certes, pourtant ce n’est jamais en soi un gage de réussite. La qualité de Tempo provient surtout d’un gros travail d’écoute et d’un rapport à l’espace millimétré, d’une délicieuse tendance au burlesque. Au final, un ensemble joliment chevillé à un concept – comme le sont les meilleurs spectacles de danse.
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Tempo : bien dans le temps et l’espace
par Sylvie Laignel
La Nouvelle République des Pyrénées
Publié en décembre 2013
Le 29 Novembre, à la Halle aux Grains, Annie Kossou recevait La Compagnie du petit matin. Représentation scolaire l’après-midi et salle comble le soir pour « Tempo », une programmation de la ville de Bagnères en partenariat avec Le Conseil Général. Le temps d’un spectacle, la parole est musicale, rythmée, dansée. Danse contemporaine, hip-hop, claquettes, acrobaties, théâtre, vivante architecture de rythmes, d’écoute, d’harmonies puisées au quotidien. Une salle d’attente, froide, nue, une zone interdite d’où fuse une chaude lumière à l’ouverture de la porte par le technicien de surface ou la femme qui vivrait ici. Lieu de précipitation ou d’errance, de croisements fugaces vers d’autres destinations : de ce hall-ci, aucun ne partira. Les personnages vont de défier, se méfier, s’accorder enfin. Un fin travail d’écoute, beaucoup de talent, des artistes portés chacun par un instrument différent, un quotidien revisité dans un univers particulier et servi par le rythme et le corporel.
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Le Tempo avec La compagnie du petit matin
par D.R
La Dépêche du Midi
Publié le 26 Février 2014
Le Service Culturel de la Mairie d’Aussonne recevait vendredi à la Salle des fêtes, la Compagnie du Petit Matin de Toulouse avec «Tempo» mis en scène par Bruno Abadie. Le spectacle se déroule dans un décor minimaliste qui pourrait être un hall de gare où sept personnes attendent un train qui n’arrive pas. Ces voyageurs patientent, s’impatientent dans un monde qui ressemble à celui de Jacques Tati. Cette histoire dansée où le rythme soutenu s’accélère au fur et à mesure que le temps passe, donne lieu à des situations cocasses, loufoques et émouvantes. Des danses contemporaines, hip-hop, claquettes, acrobaties occupent admirablement l’espace. Bruitages et musique complices se substituent entièrement à la parole et harmonisent ce spectacle de danse théâtre. Les acteurs aux talents de comédiens et de danseurs ont offert plus d’une heure de plaisir au public qui les a chaleureusement applaudis.
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Tempo : une spirale millimétrée
par Zoé Guillemaud
La Provence.com
Publié le 12 Juillet 2014
Une heure face à des professionnels du geste. Des danseurs en civils, des humoristes en passants.
Tempo est une spirale millimétrée. Dans un vacarme de musique des Balkans et de gestuelles endiablées, sept acteurs nous émerveillent de légèreté avec une technique irréprochable et scandaleuse.
La compagnie du Petit Matin nous présente ce « Tempo » qui retombe toujours sur ses pieds après avoir bien voltigé. Danse-théâtre sans parole, « Tempo » surgit du cirque d’une caravane cheminant vers l’est…Une violente bourrasque dans un petit bout de gare… Dans un petit bout de théâtre, une bourrasque d’énergie positive. Bravo à cette équipe créative de bon sens.